Evénement Extra Muros – Patricia BRROTHAERS à l’Hotel Max Hallet (réalisation architecturale de Victor Horta) – Accessible du 22 au 24 mars 2024 – Vendredi, samedi de 11 h à 18 h et dimanche de 11 h à 17 h.
Les sculptures de Patricia Broothaers s’invitent à l’hotel Max Hallet du 22 au 24 mars 2024. C’est dans cette demeure art nouveau réalisée par l’architecte Victor Horta que nous vous invitons à assister au vernissage de ce solo show, le jeudi 21 mars de 18h à 21h en présence de l’artiste.
Sous les reflets des verrières, au détour d’une colonne ou à l’ombre d’une rampe d’escalier, c’est avec facétie et introversion que les êtres tendres et émotifs de Patricia Broothaers prendront pleinement possession des lieux dès ce jeudi 21 mars. Avec une timide témérité, ces individus de céramique vont, d’un pas mal assuré, à la rencontre du visiteur curieux.
Chez Patricia Broothaers, telle une première porte d’entrée menant à l’intimité de ses scukptures, il est toujours disposé avec minutie un objet, un vêtement, un quelconque élément visuel, brodant les débuts de leur personnalité respective. Ces parures tantôt esthétiques, parfois symboliques, sont les premiers reliefs que nous distinguons de ces surfaces d’argile et de pigments. Mais il ne faut pas s’y fier, bien au-delà des apparences et des premières évidences que rencontre notre regard, il se cache bien, en chacun de ces originaux personnages, un univers intérieur riche et une sensibilité à la franchise farouche qui ne réclame qu’à s’épanouir, pourvu qu’on leur laisse le temps et l’espace de fleurir.
1961 : Naissance à Auderghem (l’une des dix-neuf communes de Bruxelles). Etudie la sculpture à l’Académie d’Anvers et suit les cours de gravure de l’Académie des Arts Visuels RHoK à Etterbeek.
Patricia BROOTHAERS, lors de son processus de création intime, dépeint une humanité qui se cherche et s’expose, au fur et à mesure d’une existence en dialogue avec le spectateur. Ces œuvres remuent les recoins de la sensibilité et exultent une émotion que l’on pensait perdue. Dans toute l’expressivité d’un regard, d’une moue, d’une posture, ces œuvres interrogent le rapport à l’autre, la négociation de notre droit d’exister tel que nous sommes dans un monde qui ne nous ressemble pas toujours. Touchantes, sympathiques, vraies, voire malhabiles, les sculptures de BROOTHAERS s’éloignent d’une normalité cloisonnée, au profit d’une irréductible spécificité, avec, comme seul artifice, une attitude qui ne se pare de rien d’autre que de sincérité. Pierre Hubeaux-Colon
ÂMES SENSIBLES, S’Y TENIR
Leur regard vous fuit, se fige, s’égare dans de lointains souvenirs. Leur vie est un songe,
une onde brumeuse et silencieuse.
Nostalgie secrète, douleur discrète. Peurs enfouies ou paix retrouvée.
À quoi rêvent-elles, ces figures hiératiques et mélancoliques, ces statues de terre et de
mystères ?
Ce sont des âmes esseulées, intranquilles ; des êtres dont la noirceur romantique, les
fêlures délicates, l’insondable profondeur évoquent les héros de Tim Burton.
Héros, le sont-ils vraiment ?
Habitées par l’angoisse et l’incertitude, ces silhouettes graciles et résignées traduisent,
selon l’artiste, son incapacité à résoudre certaines situations.
« Chacune de ces figures raconte une histoire qui me préoccupe sur le moment.
Elles naissent de moi, de mon ventre ; d’où ce travail de l’argile, matière vivante. »
Une argile rouge ou noire, volcanique, magnétique, charbonneuse.
Terre nourricière, pétrie à la main, montée en colombins — ces boudins de pâte molle
— sans intervention mécanique.
« Une fois modelées, mes pièces sont enduites avec de l’engobe, un revêtement à base
d’argile délayée, puis peintes à l’aide de pigments spéciaux, qui supportent de hautes
températures. »
L’engobe anime les couleurs et autorise des jeux de grattage, dévoilant la teinte
naturelle du matériau tout en l’habillant d’effets graphiques.
Unissant plusieurs disciplines, la sculpture passionne Patricia Broothaers depuis 1980.
« Dès l’enfance, le dessin m’es
Je pense à travers les images ; j’écris avec mes sculptures.
Pour autant, je ne cherche pas à conter de longues histoires.
Les spectateurs sont libres de leur interprétation.
Je suis toujours surprise d’entendre ce qu’ils lisent dans mes œuvres. »
Et d’ajouter :
« Celles-ci sont tout sauf réalistes. Il s’agit surtout d’expression.
En exagérant certaines formes, le travail devient plus intéressant. »
Lèvres pincées, peaux crayeuses, nez anguleux, sourcils en arc de cercle à peine
ébauchés.
Comme un clin d’œil à ses origines, les visages de Broothaers portent en eux
l’énigmatique austérité des portraits de la Renaissance flamande.
Devant certaines figures semblant taillées dans l’écorce, comment ne pas songer à
l’élégante rigueur des madones en bois du gothique tardif germanique ?
Sans oublier l’ombre d’Egon Schiele, qui plane sur ces silhouettes élancées,
décharnées ; sur ces visages émaciés, expressions tourmentées, membres striés,
chevelures ondoyantes.
Les corps épousent la terre dans la nudité la plus pure, le dépouillement le plus
troublant.
Les faces glaciales et figées, masques de mélancolie, conjuguent démence et sérénité,
introspection et don de soi.
Les regards perçants, désarmants de simplicité, projettent des émotions d’une étrange
ambiguïté.
Tout se lit dans ces yeux — petites billes opaques, tantôt alertes, parfois inquiétantes,
souvent pensives et désenchantées.
Reflets d’une créatrice inspirée.
Miroirs des âmes sensibles.
Artension – Françoise Monnin, rencontre à Lille art’up